Le Fc Nantes et le cas Kita

Je me souviens encore de mon arrivée à la rédaction de FCNhisto.fr. L’une de mes premières missions consistait à décortiquer cette présidence si particulière qui marque le club depuis plus de quinze ans. À travers mes rencontres avec supporters, anciens joueurs et staffs, j’ai constitué cette fresque jaune et verte qui raconte l’histoire mouvementée de notre institution sous l’ère Kita.

La dynastie Kita : 15 ans à la tête du FC Nantes

Depuis ce fameux 28 juillet 2007, Waldemar Kita dirige les destinées du FC Nantes, accompagné de son fils Franck comme directeur général délégué. Cette présidence familiale représente un cas unique dans le paysage footballistique français par sa longévité. Au fil de ces quinze années, j’ai vu défiler les saisons avec leurs lots de hauts et de bas.

Le bilan sportif reste paradoxal : deux descentes en Ligue 2 mais aussi deux remontées immédiates dans l’élite. Je garde notamment en mémoire cette magnifique 7ème place lors de la saison 2016-2017 qui nous avait fait rêver d’Europe. Et comment oublier ce frisson collectif ressenti à la Beaujoire lors de la victoire en Coupe de France 2022 ? Ce trophée tant attendu depuis 2001 a semblé, l’espace d’un instant, réconcilier le président avec ses supporters.

Sa vision entrepreneuriale affichée vise à consolider les finances tout en maintenant le club dans l’élite. Mais au fil de mes enquêtes et témoignages recueillis, j’ai constaté que cette approche créait souvent des tensions avec l’identité historique du club.

Les affaires judiciaires qui entachent l’image du propriétaire nantais

Les 7 et 8 juillet 2022 ont marqué un tournant : Waldemar Kita et son épouse Chantal ont été mis en examen pour des chefs de fraude fiscale et blanchiment aggravé. En fouillant dans les archives et documents judiciaires, j’ai découvert l’ampleur des accusations.

Des montages financiers complexes

Le fisc français aurait été lésé de 14,8 millions d’euros uniquement au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune. La résidence fiscale belge du président est jugée fictive par les enquêteurs. Plus troublant encore, entre 2010 et 2019, Waldemar Kita aurait perçu au moins 70 millions d’euros au Luxembourg sans payer d’impôt sur le revenu en France.

Parallèlement à cette affaire, la JIRS de Rennes a ouvert une enquête distincte sur certains transferts du club. Cette procédure a conduit à la mise en examen de Franck Kita en juin 2023, suivie par celle du FC Nantes avec mon expérience de personne morale. Plusieurs agents de joueurs se trouvent également impliqués.

La méthode Kita : entre gestion financière et controverses

Au cours de mes entretiens avec d’anciens membres de la direction, j’ai analysé le modèle économique instauré par les Kita. Les bilans financiers révèlent parfois des résultats positifs, comme lors de la saison 2018-2019 avec 514 000 euros de bénéfice net et un résultat d’exploitation record de 13,84 millions d’euros.

Cette performance repose essentiellement sur une stratégie de trading de joueurs comme source principale de revenus. Cette politique divise profondément la communauté nantaise. Les supporters que j’ai rencontrés reprochent souvent au président de privilégier la rentabilité au détriment du projet sportif.

Je me rappelle particulièrement cette anecdote révélatrice : en 2021, en pleine période Covid où nombreux clubs gelaient les primes, Waldemar Kita avait promis 50 000 euros par joueur en cas de maintien. Antoine Kombouaré, notre entraîneur, avait alors déclaré : Â«Â Je ne pense pas que l’argent permette de faire courir plus, de motiver plus et de gagner plus ». Cette divergence illustrait parfaitement la fracture entre vision entrepreneuriale et approche sportive.

Formation et recrutement : des pratiques qui font débat

L’Académie nantaise reste l’une des fiertés du club, classée 4ème meilleur centre de formation en 2017. Elle a vu émerger des talents comme :

  • Jordan Vérétout, aujourd’hui pilier de l’Olympique de Marseille
  • Amine Harit, brillant milieu offensif formé à la nantaise
  • Enock Kwateng, défenseur issu de notre vivier

Pourtant, certaines décisions concernant les jeunes suscitent l’incompréhension. J’ai enquêté sur le cas emblématique de Lancelot Carbon qui a obtenu un contrat professionnel après seulement 87 minutes de jeu en quatre ans. Son arrivée aurait été conditionnée à la prolongation d’Andrei Girotto. Ce traitement préférentiel crée des tensions au sein même de l’Académie, avec d’autres jeunes joueurs méritants écartés.

Un schéma similaire s’est répété avec Maxime Mejjati-Alami, fils d’un agent ami des Kita, qui n’a joué que 142 minutes avant d’être prêté. Ces exemples illustrent une politique de formation parfois déconnectée des performances sportives.

Les relations tendues avec les supporters et les institutions

Au fil de mes chroniques et rencontres, j’ai documenté les relations souvent conflictuelles entre la direction et son environnement. Les manifestations des supporters réclamant le départ du président sont devenues quasi rituelles à la Beaujoire.

Les rapports avec les autres clubs professionnels révèlent également cette approche singulière. Je pense notamment à cet épisode du match contre le PSG, initialement refusé puis finalement reporté « pour aider le club parisien » en Ligue des Champions. Ou encore ce conflit avec la JA Drancy en Coupe de France concernant le partage des recettes billetterie.

Ces tensions créent un climat parfois délétère qui impacte l’image du FC Nantes auprès des instances et collectivités locales. Chaque saison apporte son lot de polémiques qui éloignent le club de son ambition d’unité et de rassemblement.

L’avenir du FC Nantes : quelles perspectives sous l’ère Kita ?

Les rumeurs de vente du club reviennent régulièrement dans mes discussions avec mes sources internes. Plusieurs investisseurs auraient manifesté leur intérêt ces dernières années. L’impact des procédures judiciaires pourrait accélérer ou freiner ce processus de transmission.

Malgré ces incertitudes, des projets de développement continuent d’être annoncés : modernisation du centre d’entraînement, réflexions autour d’un nouveau stade, stratégies pour développer la marque à l’international. Le président a récemment réaffirmé son attachement au club et sa volonté de le maintenir durablement dans l’élite.

Pour l’avenir proche, le défi majeur reste sportif : stabiliser le FC Nantes en Ligue 1 tout en reconstruisant un projet qui fédère supporters, joueurs, staff et partenaires. Cette réconciliation sera-t-elle possible sous l’ère Kita ? C’est la question que je continue d’chercher à travers chacune de mes rencontres avec ceux qui font vivre notre club au quotidien.

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