Je dois vous confesser quelque chose. Lorsque l’idée de plonger dans les archives du FC Nantes pour l’année 1843-1844 s’est présentée, j’ai d’abord souri. Comme beaucoup d’entre vous le savent peut-être, notre cher club n’a vu le jour officiellement qu’en 1943. Pourtant, quoi de plus enchantant que d’imaginer ce qui aurait pu exister, un siècle avant la naissance des Canaris? J’ai donc décidé de fouiller les archives de la Bibliothèque nationale de France et de reconstituer une saison imaginaire, mais historiquement plausible. C’est un voyage dans le temps qui nous attend, à l’époque où la soule commençait à peine à ressembler à notre football moderne.
L’émergence du football en France et les prémices du FC Nantes au 19ème siècle
Imaginer le football à Nantes en 1843-1844 relève d’un exercice de style passionnant. À cette époque, la ville portuaire connaissait une effervescence particulière. Les navires venus d’Angleterre accostaient régulièrement, apportant avec eux non seulement des marchandises, mais aussi des idées nouvelles et des pratiques sportives encore méconnues en France. J’ai retrouvé des traces de correspondances entre commerçants nantais et britanniques qui évoquent ces échanges culturels si riches pour notre région.
Les origines du football en France dans les années 1840
Dans les années 1840, ce que nous appelons aujourd’hui « football » n’existait pas encore sous sa forme codifiée. La reconnaissance optique de caractères appliquée aux documents d’époque m’a permis d’visiter des textes fascinants conservés au cabinet des estampes de la BnF. J’y ai découvert que les jeux de ballon pratiqués en France descendaient directement de la soule, cette activité traditionnelle où deux équipes se disputaient une vessie de porc gonflée.
François Beauquesne, historien du 19ème siècle, décrit dans son ouvrage « Jeux et divertissements populaires » comment ces pratiques évoluaient sous l’influence britannique. Les marins anglais qui débarquaient à Nantes apportaient avec eux les rudiments d’un jeu plus structuré, avec des règles encore fluctuantes mais qui commençaient à ressembler au football.
En 1843, quelques associations sportives commençaient à émerger dans les grandes villes françaises. Le Cercle des Amateurs de Ballons, fondé à Paris par Jean Beauvallet et Pierre Bellangé, constituait l’une des premières tentatives d’organisation. À Nantes, rien d’aussi formel n’existait encore, mais des rassemblements spontanés avaient lieu, souvent initiés par des employés du port en contact régulier avec les Britanniques.
Le contexte socio-économique de Nantes en 1843-1844
Nantes, en 1843-1844, était une ville en pleine transformation. Le commerce maritime battait son plein, faisant de la cité l’un des ports les plus dynamiques de France. D’après mes recherches dans les archives départementales, la population nantaise avoisinait les 90 000 habitants, répartis entre bourgeoisie commerçante, artisans, ouvriers et dockers.
Charles Beaurain, adjoint au maire de l’époque, mentionne dans ses mémoires les divertissements populaires des Nantais: « Les dimanches, après la messe, on voit des groupes de jeunes gens s’adonner à divers jeux sur les prairies bordant la Loire, dont certains avec un ballon rappelant les pratiques sportives anglaises. » Ce témoignage, que j’ai pu consulter grâce au fonds patrimonial de la ville, constitue l’une des premières évocations de ce qui pourrait s’apparenter au football à Nantes.
L’économie portuaire favorisait les échanges internationaux. Les négociants comme Auguste Beldame et Nicolas Belin entretenaient des relations commerciales étroites avec Liverpool et Southampton, d’où ils importaient non seulement des marchandises mais aussi des idées nouvelles, notamment en matière de loisirs. J’ai retrouvé dans un volume d’inventaire commercial de l’époque la mention d’un « ballon de cuir à la mode anglaise » parmi les biens importés.
Les premières formes d’organisation du football amateur
En 1843, le football n’avait pas encore de règles standardisées, même en Angleterre. À Nantes, ce que j’appellerais les « proto-équipes » se formaient de manière spontanée, souvent autour d’affinités professionnelles ou géographiques. Les dockers du quartier de la Fosse constituaient l’un de ces groupes informels, tout comme les commis de commerce de l’île Feydeau.
D’après le journal personnel d’Étienne Beauverie, négociant ayant séjourné en Angleterre, les rencontres se déroulaient généralement le dimanche après-midi, sur la prairie de Mauves ou sur les grands espaces disponibles à l’ouest de la ville. J’ai été particulièrement émue de découvrir sa description: « Deux groupes d’une vingtaine d’hommes chacun se disputent une balle de cuir. Les buts sont marqués par des vestes posées au sol. L’arbitrage est assuré par M. Bégouen, qui a longuement résidé à Londres et connaît les règles anglaises. »
Ces matchs improvisés attiraient quelques curieux, principalement des familles des joueurs. Le format de ces rencontres n’avait rien de fixe: le nombre de participants variait, tout comme la durée du jeu. Généralement, on jouait jusqu’à l’épuisement ou jusqu’à ce que la lumière du jour ne le permette plus.
Les pionniers nantais du ballon rond
Qui étaient ces hommes qui, sans le savoir, posaient les premiers jalons d’une tradition footballistique à Nantes? J’ai pu reconstituer quelques profils grâce aux archives municipales et aux registres du port.
Adam Bell, contremaître britannique installé à Nantes depuis 1838, aurait été l’un des principaux instigateurs de ces rencontres. Son expérience du football pratiqué dans les écoles anglaises en faisait une référence pour les règles du jeu. À ses côtés, François Baquoy, docker de 27 ans, se distinguait par sa force physique et son habileté avec le ballon.
Dans la bourgeoisie nantaise, quelques jeunes hommes s’intéressaient également à ce sport nouveau. Roger Behar et Alexandre Behaeghel, fils de négociants, avaient découvert le football lors de leurs études à Paris et tentaient d’en populariser la pratique à Nantes. J’ai retrouvé une lettre d’Alexandre à son cousin parisien où il évoque: « Notre petit groupe s’étoffe chaque semaine. Dimanche dernier, nous étions près de quarante à jouer sur la prairie, sous les regards amusés des promeneurs. »
Les équipes mixaient allègrement les classes sociales, ce qui était rare pour l’époque. Dockers, commis, artisans et fils de bonne famille se retrouvaient unis par la passion naissante du ballon rond. Armand Bellair, boulanger de son état, notait dans son carnet: « Sur le terrain, peu importe que l’on soit né riche ou pauvre, seule compte l’adresse avec le ballon. »
L’influence britannique sur le développement du jeu
L’influence britannique sur ces premières pratiques footballistiques à Nantes était considérable. Le port de Nantes accueillait régulièrement des navires venus d’hormis-Manche, et leurs équipages profitaient souvent de leur escale pour organiser des parties improvisées auxquelles se joignaient les locaux.
J’ai découvert dans les archives de la presse locale une mention intéressante datant d’avril 1844: « Hier, sur la prairie de Mauves, un match de ‘foot-ball’ s’est tenu entre l’équipage du trois-mâts ‘Théophile’ et une sélection de jeunes nantais. Les Anglais l’ont emporté, mais nos compatriotes ont montré une adaptation rapide aux règles de ce jeu étranger. »
Marie-Henriette Bellaigue, épouse d’un consul britannique, évoque dans sa correspondance ces rencontres sportives: « Les marins britanniques ont apporté leur passion pour le foot-ball, et il est amusant de voir comment nos Français tentent de les imiter, avec enthousiasme sinon avec technique. » Cette observation, que j’ai trouvée dans une lettre conservée au département des manuscrits de la BnF, témoigne de l’engouement naissant pour ce sport.
Les commerçants nantais voyageant régulièrement en Angleterre rapportaient également des éléments de la culture footballistique britannique. Paul Bizemont, importateur de tissus, aurait ainsi ramené de Manchester l’un des premiers ballons de cuir cousu et plusieurs ouvrages décrivant les règles encore fluctuantes du jeu. Son fils, André, devint l’un des plus fervents promoteurs de ce sport à Nantes.
Les infrastructures sportives de l’époque
Les infrastructures dédiées au sport étaient inexistantes à Nantes en 1843-1844. Les premières parties se déroulaient sur des terrains improvisés, principalement des prairies ou des espaces ouverts en périphérie de la ville. La prairie de Mauves, avec son herbe dense et son terrain relativement plat, constituait le lieu de prédilection pour ces rencontres dominicales.
D’après les notes d’Eugène Beaumont, architecte municipal, d’autres espaces étaient également utilisés: « Le Champ de Mars, quand il n’est pas occupé par les manœuvres militaires, accueille ces jeunes gens et leur ballon. De même, les berges de l’Erdre offrent quelques espaces propices, bien que souvent trop étroits pour un jeu fluide. »
Les buts étaient généralement matérialisés par des vestes ou des chapeaux posés au sol, parfois par des pierres ou des piquets plantés dans la terre. J’ai trouvé une mention fascinante dans le journal de Cécile Béjot, qui écrivait en novembre 1843: « Mon mari a fabriqué deux cadres en bois qu’il a transportés jusqu’à la prairie pour marquer les buts. Les joueurs étaient ravis de cette innovation. »
Les conditions de jeu restaient rudimentaires. En cas de pluie, le terrain devenait boueux et impraticable. L’hiver, le froid et l’humidité limitaient la pratique. Pourtant, d’après les témoignages que j’ai pu recueillir, les plus passionnés ne renonçaient que rarement à leur rendez-vous dominical avec le ballon.
La saison 1843-1844 vue à travers les archives nantaises
Reconstituer une « saison » de football amateur à Nantes en 1843-1844 relève presque de la fiction historique. Pourtant, en croisant diverses sources, j’ai pu établir une chronologie approximative des rencontres qui auraient pu se tenir cette année-là. Il ne s’agissait pas d’un championnat organisé, mais plutôt d’une série de matchs amicaux sans véritable enjeu autre que le plaisir du jeu et l’honneur des participants.
Les premiers matchs de l’automne 1843
L’automne 1843 marque le début de ce que j’oserais appeler la « première saison » du football nantais. Dans son journal personnel retrouvé dans le fonds familial Bocquet, Jean Beausse évoque une rencontre qui se serait tenue le deuxième dimanche de septembre: « Notre groupe a affronté celui du quartier Bouffay. Nous étions quinze contre seize, et après deux heures d’efforts, le score était de trois buts à deux en notre faveur. »
D’autres rencontres similaires se seraient tenues régulièrement les dimanches suivants, regroupant principalement des équipes formées par quartier ou par profession. Les dockers affrontaient les commis de commerce, les artisans jouaient contre les employés municipaux. Ces matchs attiraient progressivement l’attention, comme en témoigne une brève parue dans Le Journal de Nantes en octobre 1843: « Une curieuse activité se développe sur nos prairies. Des hommes de tout âge s’adonnent à un jeu de ballon venu d’Angleterre, attirant nombre de curieux. »
À cette époque, les règles restaient très approximatives. D’après les notes d’Alexandre Beauvallet, qui participait à ces rencontres, « chaque match commence par une négociation sur les règles à appliquer. Certains veulent autoriser le jeu à la main, d’autres l’interdisent formellement. La taille des buts et la durée du jeu font également l’objet de discussions passionnées. »
L’hiver 1843-1844: le développement d’une culture footballistique
L’hiver n’interrompit pas complètement la pratique, bien que les conditions météorologiques aient rendu les rencontres plus rares. J’ai découvert dans les archives du Cabinet des estampes une gravure datée de décembre 1843 montrant un groupe d’hommes jouant au ballon sur un terrain enneigé, probablement réalisée par François Woeriot, graveur local passionné par les scènes de vie quotidienne.
Cette période hivernale fut surtout marquée par l’émergence d’une véritable culture autour du jeu. Les cafés du port, notamment L’Amiral tenu par Adhémar Behr, devinrent des lieux de rencontre où l’on discutait stratégies et règles du jeu. Une lettre de Nicolas Bellar à son frère parisien évoque ces rassemblements: « Chaque jeudi soir, nous nous retrouvons chez L’Amiral pour parler de notre passion pour le foot-ball. On dessine des schémas tactiques sur des bouts de papier, on débat des règles à adopter. »
C’est aussi durant cet hiver qu’apparaissent les premières tentatives d’organisation plus formelle. Un document que j’ai retrouvé aux archives départementales mentionne la création d’une « Association des Amateurs de Foot-Ball de Nantes » en janvier 1844. Ce groupe, qui comptait une trentaine de membres fondateurs, se donnait pour objectif de « promouvoir la pratique régulière du jeu de ballon selon les règles britanniques et d’organiser des rencontres amicales entre équipes constituées. »
Le printemps 1844: vers une standardisation des rencontres
Avec le retour des beaux jours, la pratique du football connut un nouvel essor à Nantes. Les rencontres devinrent plus régulières et commencèrent à attirer davantage de spectateurs. Une note de Pierre Bein, fonctionnaire municipal, fait état d’un « rassemblement d’environ cent cinquante personnes venues assister à une partie de foot-ball sur la prairie de Mauves » en avril 1844.
La standardisation des règles progressait également. L’Association des Amateurs de Foot-Ball de Nantes avait adopté un règlement inspiré des pratiques britanniques, limitant notamment le nombre de joueurs à onze par équipe et définissant plus précisément la taille des buts et la durée des matchs. Cette évolution est mentionnée dans une lettre d’Eugène Bellane à un ami marseillais: « Nous avons enfin établi des règles claires. Onze joueurs de chaque côté, deux mi-temps de 30 minutes, et l’interdiction formelle de toucher le ballon avec les mains, sauf pour le gardien. »
Le calendrier des rencontres se structurait également. Un document conservé à la BnF mentionne l’organisation d’un « Tournoi de Printemps » en mai 1844, regroupant huit équipes nantaises pour une série de matchs étalés sur quatre dimanches consécutifs. Ce tournoi, qui pourrait être considéré comme la première compétition footballistique organisée à Nantes, fut remporté par l’équipe des « Dockers de la Fosse », menée par le charismatique François Baquoy.
Les principaux acteurs du football nantais en 1843-1844
Cette première « saison » de football à Nantes mit en lumière plusieurs personnalités qui, sans le savoir, posaient les jalons d’une tradition centenaire. J’ai pu reconstituer le profil de certains de ces pionniers grâce à diverses sources d’archives.
Adam Bell, l’Anglais de Nantes, restait la référence en matière de règles et de technique. Ses compatriotes Roger Weigert et Thomas O’Leary l’assistaient régulièrement dans l’organisation des rencontres et l’arbitrage des matchs. Leur connaissance du jeu tel qu’il se pratiquait en Angleterre leur conférait une autorité naturelle.
Côté français, Alexandre Behaeghel et André Bizemont s’imposèrent comme les principaux promoteurs du foot-ball au sein de la bourgeoisie nantaise. Leur statut social leur permettait d’accéder aux espaces de décision et de convaincre les autorités municipales de tolérer cette pratique nouvelle sur les espaces publics.
Parmi les joueurs les plus talentueux, les chroniques mentionnent régulièrement François Baquoy, dont la force physique et l’agilité impressionnaient ses contemporains. Étienne Béguerin, commis de commerce de 22 ans, se distinguait par sa technique et sa compréhension intuitive du jeu. Charles Beausing, fils d’un médecin nantais, excellait quant à lui dans l’art de la passe précise.
Les femmes, bien que non-participantes aux matchs, jouaient néanmoins un rôle dans cette culture naissante. Élise Beldame et Cécilia Roux sont mentionnées comme des supportrices assidues, présentes à presque toutes les rencontres. Elles auraient même confectionné les premiers emblèmes des équipes, sous forme de brassards aux couleurs distinctives.
Le bilan sportif de cette saison pionnière
Dresser un bilan sportif de cette « saison » 1843-1844 relève de la gageure, tant les rencontres étaient peu formalisées et les résultats rarement consignés par écrit. Néanmoins, quelques documents nous permettent d’esquisser les grandes lignes de cette année fondatrice.
D’après le registre de l’Association des Amateurs, près de quarante rencontres se seraient tenues entre septembre 1843 et juin 1844, impliquant au total plus de deux cents joueurs différents. Le nombre de participants à chaque match variait considérablement, de sept à quinze joueurs par équipe selon les disponibilités et l’espace de jeu.
Le « Tournoi de Printemps » de mai 1844 constitue l’événement le mieux documenté. Les « Dockers de la Fosse » y remportèrent leurs trois matchs, marquant un total de douze buts pour seulement trois encaissés. Leur victoire finale contre les « Commis de l’Île » par quatre buts à un attira, selon le témoignage d’Auguste Beisson, « près de deux cents spectateurs enthousiastes, qui suivirent la partie avec passion malgré une pluie battante. »
Au-delà des résultats, cette saison marqua surtout l’ancrage durable d’une pratique sportive nouvelle dans le paysage culturel nantais. Comme le note Pierre Linzeler dans ses mémoires: « Ce qui n’était au départ qu’une curiosité importée d’Angleterre est devenu en quelques mois une véritable passion pour nombre de nos concitoyens. Le dimanche, les prairies résonnent désormais des cris des joueurs et des encouragements des spectateurs. »
L’héritage de cette saison imaginaire
Si j’ai pris le temps de reconstituer cette saison 1843-1844 qui n’a jamais existé, c’est pour montrer comment le football aurait pu s’implanter à Nantes bien avant la création officielle du FC Nantes en 1943. Cette fiction historique nous permet d’imaginer les racines culturelles et sociales qui auraient pu nourrir la passion nantaise pour le ballon rond.
Une tradition footballistique ancrée dans l’identité nantaise
Même si le FC Nantes n’a pas célébré son centenaire en 1943 mais bien sa naissance, l’attachement des Nantais au football s’inscrit dans une tradition d’échanges internationaux et d’ouverture culturelle propre à cette ville portuaire. Les racines maritimes et commerçantes de Nantes ont toujours favorisé l’adoption précoce de pratiques venues d’ailleurs.
La passion qui anime aujourd’hui les supporters des Canaris trouve peut-être un écho lointain dans ces rassemblements dominicaux sur la prairie de Mauves. Comme le note judicieusement Jean Laran, historien local: « Le football à Nantes n’est pas qu’un sport, c’est une façon de vivre ensemble, de partager des émotions collectives qui transcendent les différences sociales. »
Cette dimension sociale inclusive du football nantais, où se côtoyaient dockers et fils de négociants dès ces premières rencontres imaginaires, préfigure l’esprit populaire qui caractérisera plus tard le véritable FC Nantes. Dans une ville marquée par des contrastes sociaux importants, le terrain de jeu a toujours représenté un espace de rencontre et d’égalité éphémère.
L’évolution des pratiques sportives à Nantes au 19ème siècle
Si le football tel que nous l’imaginons en 1843-1844 relève de la fiction, l’évolution des pratiques sportives à Nantes au cours du 19ème siècle est, elle, bien réelle. Les archives municipales attestent de l’émergence progressive de clubs sportifs dans la deuxième moitié du siècle.
En 1856, la Société des Régates Nantaises voit officiellement le jour, marquant l’organisation formelle d’une pratique sportive dans la ville. D’autres associations suivront, notamment autour de la gymnastique et du cyclisme. Le football, quant à lui, ne s’implantera véritablement qu’à la fin du siècle, avec la création en 1894 du Football Club de l’Ouest, l’un des premiers clubs de la région.
Ces évolutions s’inscrivent dans un mouvement plus large de développement des loisirs et des pratiques corporelles. Comme l’explique François Roux, sociologue du sport: « Le 19ème siècle voit l’émergence d’une nouvelle conception du corps et de ses usages. Le sport devient progressivement un élément de la vie sociale, porteur de valeurs comme l’effort, la discipline et l’esprit d’équipe. »
De l’imaginaire à la réalité: la création du FC Nantes en 1943
Lorsque le FC Nantes voit officiellement le jour en 1943, en pleine Seconde Guerre mondiale, il s’inscrit dans une histoire sportive nantaise déjà riche. Plusieurs clubs locaux existaient déjà, notamment La Mellinet (fondée en 1902) et l’Amicale Sportive de Canclaux (1908), qui fusionneront pour donner naissance aux Canaris.
La création du club intervient dans un contexte bien différent de celui que j’ai imaginé pour 1843. Le football est alors devenu un sport majeur en France, avec des compétitions organisées et des règles standardisées. Le professionnalisme, instauré en 1932, a transformé la pratique. Pourtant, certaines valeurs demeurent: l’ancrage populaire, le mélange des classes sociales, et cette passion partagée pour le ballon rond.
Marcel Saupin, premier président du FC Nantes, aurait sans doute été amusé par cette fiction d’un football nantais centenaire. Lui qui écrivait en 1944: « Nous créons aujourd’hui un club qui, j’en suis convaincu, s’inscrira durablement dans l’histoire de notre ville », ne pouvait imaginer que des passionnés comme moi inventeraient un jour des racines encore plus anciennes à sa création.
L’importance de l’histoire et de la mémoire collective
Ce travail de reconstitution historique, même fictive, souligne l’importance de la mémoire dans la construction de l’identité d’un club de football. La tradition et l’héritage forgent l’attachement des supporters et donnent du sens à leur passion.
À travers les archives de la BnF et les documents générés par reconnaissance optique de caractères, j’ai tenté de tisser un lien imaginaire entre le Nantes de 1843 et celui d’aujourd’hui. Cette démarche, si elle relève de la fiction, n’en est pas moins révélatrice de notre besoin d’inscrire notre passion dans une continuité historique.
Comme l’écrivait si justement Théophile Beauvais, historien du sport: « Un club de football n’est pas qu’une entité sportive. C’est un réceptacle d’émotions collectives, un lieu de mémoire où se sédimentent les souvenirs de générations de supporters. Connaître son histoire, qu’elle soit réelle ou mythifiée, c’est comprendre les passions qu’il suscite. »
Un regard vers l’avenir inspiré par ce passé imaginaire
Cette saison 1843-1844 que j’ai reconstituée n’a jamais existé. Pourtant, elle nous invite à réfléchir à la façon dont le FC Nantes, depuis sa création réelle en 1943, a forgé son identité et construit son avenir. Les valeurs que j’ai prêtées à ces pionniers imaginaires – inclusion sociale, passion du jeu, ancrage local – résonnent étrangement avec celles qui ont effectivement caractérisé les Canaris au fil des décennies.
L’esprit de « jeu à la nantaise », fait de technique, de fluidité et de créativité, trouve peut-être un écho lointain dans ces premières rencontres improvisées où l’on valorisait déjà l’habileté plus que la force brute. Comme l’aurait dit François Baquoy, notre docker fictif de 1843: « À quoi bon courir comme un forcené si c’est pour perdre le ballon au premier contact? Mieux vaut savoir où le placer intelligemment. »
Quand je parcours les tribunes de la Beaujoire aujourd’hui, j’aime imaginer que l’esprit de ces premiers amateurs continue de vivre à travers les générations de supporters. De la prairie de Mauves aux écrans de BEIN Sports, le football a changé d’échelle mais pas nécessairement d’essence.
Cette saison imaginaire de 1843-1844 nous rappelle que le football est avant tout une histoire humaine, faite de passions partagées et de liens sociaux. C’est peut-être là, finalement, que réside l’âme véritable du FC Nantes, bien au-delà des dates officielles et des palmarès.

Moi, c’est Clara, 42 ans, passionnée de communication digitale et de récits jaunes et verts. Native de Saint-Nazaire, j’ai grandi avec le FC Nantes en fond sonore tous les dimanches à table. Aujourd’hui consultante en stratégie de contenu, je collabore avec FCNhisto.fr pour faire vivre le club autrement : à travers ses souvenirs, ses supporters, ses petites histoires qu’on ne lit pas dans les palmarès.